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Cinéaste engagé, le réalisateur haïtien jongle avec fluidité entre réalité et fiction, politique et romanesque, sans renoncer au regard critique qui a fait son succès.

Ernest Cole, photographe sud-africain, a été le premier à exposer au monde entier les horreurs de l'apartheid. Son livre House of Bondage, publié en 1967 alors qu'il n'avait que 27 ans, l’a conduit à s'exiler à New York et en Europe pour le reste de sa vie, sans jamais retrouver ses repères. Raoul Peck raconte ses errances, ses tourments d’artiste et sa colère au quotidien, face au silence ou la complicité du monde occidental devant les horreurs du régime de l’Apartheid. Il raconte aussi comment, en 2017, 60 000 négatifs de son travail sont découverts dans le coffre d'une banque suédoise.

Raoul Peck raconte ses errances, ses tourments d’artiste et sa colère au quotidien, face au silence ou la complicité du monde occidental devant les horreurs du régime de l’Apartheid.

Ernest Cole, photographe

En juin 1979, l&rsquo;auteur noir am&eacute;ricain James Baldwin &eacute;crit &agrave; son agent litt&eacute;raire pour lui raconter le livre qu&#39;il pr&eacute;pare : le r&eacute;cit des vies et des assassinats de ses amis Martin Luther King Jr., Medgar Evers, membre de la National Association for the Advancement of Colored People (NAACP) et Malcolm X. En l&#39;espace de cinq ann&eacute;es, leur mort a traumatis&eacute; une g&eacute;n&eacute;ration. En 1987, l&#39;&eacute;crivain dispara&icirc;t avant d&#39;avoir achev&eacute; son projet. Il laisse un manuscrit de trente pages, Notes for Remember this House, que son ex&eacute;cuteur testamentaire confiera plus tard &agrave; Raoul Peck (L&#39;&eacute;cole du pouvoir, Lumumba).

 
Avec pour seule voix off la prose fi&eacute;vreuse et combative de Baldwin, le cin&eacute;aste revisite les ann&eacute;es sanglantes de lutte pour les droits civiques, les trois assassinats pr&eacute;cit&eacute;s, et se penche sur la recrudescence actuelle de la violence envers les Noirs am&eacute;ricains, ce qui conf&egrave;re une troublante actualit&eacute; aux propos de l&#39;&eacute;crivain. James Baldwin ne se contente pas de d&eacute;noncer les violences et les discriminations &agrave; l&#39;&eacute;gard des Noirs, la terreur dans laquelle lui et ses semblables vivent. Il s&#39;attaque &agrave; ce qui, dans la culture am&eacute;ricaine, et le cin&eacute;ma hollywoodien en particulier, s&#39;obstine &agrave; fausser la r&eacute;alit&eacute; : l&#39;innocence factice, l&#39;h&eacute;ro&iuml;sme c&ocirc;t&eacute; blanc, la souffrance, la faiblesse c&ocirc;t&eacute; noir, sans oublier les hypocrites sc&egrave;nes de r&eacute;conciliations raciales. &quot;Les Blancs doivent chercher &agrave; comprendre pourquoi la figure du n&egrave;gre leur &eacute;tait n&eacute;cessaire&quot;, ass&egrave;ne-t-il lors d&#39;une allocution t&eacute;l&eacute;vis&eacute;e.

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&Agrave; ce commentaire, &agrave; mi-chemin entre col&egrave;re froide et implacable r&eacute;quisitoire, dit par JoeyStarr (Samuel L. Jackson assurant, lui, la version anglaise) r&eacute;pond, dans une alchimie impeccable, un fascinant flot d&#39;images (reportages, archives, extraits de films, photos) qui nous propulse au c&oelig;ur de l&#39;identit&eacute; am&eacute;ricaine, voire occidentale, de ses cruaut&eacute;s et de ses faux-semblants. En plus de rendre hommage &agrave; un &eacute;crivain majeur, ce documentaire, prim&eacute; &agrave; maintes reprises, offre un voyage saisissant au c&oelig;ur d&#39;une soci&eacute;t&eacute; am&eacute;ricaine au bord de l&#39;implosion. L&#39;un des plus beaux films de Raoul Peck qui, &agrave; l&#39;instar de Baldwin, porte sur son sujet un regard sensible et engag&eacute;.

I am not your negro

Avec pour seul commentaire la prose incisive de l&#39;&eacute;crivain James Baldwin, Raoul Peck livre un &eacute;blouissant r&eacute;quisitoire sur la question raciale.

Je ne suis pas votre nègre

Port-au-Prince, peu de temps après le séisme du 12 janvier 2010. Dans le quartier chic de Pacot, un couple de bourgeois aisés campe dans ce qui reste de sa luxueuse villa, en partie en ruines. Pour tenter d'éviter la démolition, l'homme décide de louer le premier étage, encore habitable. Avec ses bagages, son chauffeur, son 4x4 et son autosatisfaction, Alex, un "humanitaire", amène aussi sa maîtresse haïtienne, Andrémise, une jeune femme affranchie, bien décidée à échapper au désastre ambiant par le seul moyen dont elle dispose : son corps. Entre les anciens et les nouveaux maîtres de la maison, la tension s'installe d'emblée. Il y a aussi le fantôme du "petit", un enfant pauvre que le couple avait adopté, et dont le cadavre gît quelque part sous les gravats… Lignes de faille 	Andrémise, qui se rebaptise elle-même Jennifer, afin de marquer son désir farouche d'une nouvelle vie, est la lointaine héritière de l'ange amoureux campé par Terence Stamp, qui bouleversait en 1968, dans Théorème de Pasolini, une famille de bourgeois milanais. Elle affirme avec insolence son appétit de vivre, sa sexualité et sa liberté face aux trois personnages qui l'entourent, chacun enfermé dans ses chimères : la femme inconsolable (à laquelle la chanteuse Ayo insuffle une part de mystère), qui pleure sur elle-même plus que sur les innombrables victimes du séisme, le mari, qui cache son humiliation derrière un froid détachement, le Blanc pathétique et veule, qui prétend "aider" quand il vient seulement profiter de la misère d'Haïti. Elle va ainsi les pousser dans leurs derniers retranchements. Raoul Peck (<a href="http://arte-magazine.arte.tv/program/19323/L_eCOLE_DU_POUVOIR__1_">L'école du pouvoir</a>, Lumumba, la mort d'un prophète) a eu l'idée du film alors qu'il commençait à tourner pour ARTE son documentaire à charge sur l'aide humanitaire, <a href="http://arte-magazine.arte.tv/program/33239/Assistance_mortelle_">Assistance mortelle</a>. Coécrit avec son compatriote le romancier et poète Lyonel Trouillot et avec Pascal Bonitzer, ce huis clos implacable s'inscrit dans la continuité d'une œuvre traversée par la question du pouvoir - ici, celui des dominants de toujours, que les lignes de faille du séisme ont laissé presque intact. Une œuvre amère et forte, présentée cette année au festival de Toronto et à la Berlinale.

En une lointaine référence au Théorème de Pasolini, Raoul Peck signe un huis clos implacable sur la lutte des classes, dans les ruines du tremblement de terre en Haïti.

Meurtre à Pacot

Exterminez toutes ces brutes est un voyage dans le temps qui revisite de mani&egrave;re radicale l&rsquo;histoire du colonialisme europ&eacute;en, de l&rsquo;Am&eacute;rique &agrave; l&rsquo;Afrique. Repoussant les fronti&egrave;res du film documentaire de cr&eacute;ation, Raoul Peck organise une structure dramatique implacable, faite d&rsquo;images d&rsquo;archives et de s&eacute;quences sc&eacute;naris&eacute;es incarn&eacute;es par l&rsquo;acteur Josh Hartnett (Pearl Harbor), tout en nous guidant &agrave; travers les heures les plus sombres de l&rsquo;humanit&eacute; jusqu&rsquo;&agrave; aujourd&rsquo;hui. En quatre &eacute;pisodes, le cin&eacute;aste d&eacute;construit la fabrication et les silences de l&rsquo;histoire, cette Histoire dont l&rsquo;Occident a constamment tordu les r&eacute;alit&eacute;s. Il met &agrave; jour, sans compromis, l&rsquo;id&eacute;ologie du supr&eacute;macisme blanc et du racisme, obligeant le spectateur &agrave; repenser sa propre histoire intime et officielle.

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1ere partie&nbsp;: La troublante conviction de l&rsquo;ignorance 
Le cin&eacute;aste Raoul Peck parcourt les courants de civilisation, de colonisation et d&rsquo;extermination qui constituent l&rsquo;histoire m&ecirc;me de l&rsquo;Occident. &Agrave; partir de ces trois mots cl&eacute;s, qui d&eacute;finissent l&rsquo;essence m&ecirc;me du d&eacute;veloppement de l&rsquo;Europe, il reconstitue les encha&icirc;nements de cette histoire tragique.

2e partie&nbsp;: P***** de Christophe Colomb&nbsp; 
De Christophe Colomb &agrave; l&rsquo;esclavage des Africains, Raoul Peck interroge et met en ab&icirc;me sa trajectoire personnelle face &agrave; la &laquo;vraie&raquo; histoire telle que racont&eacute;e et fig&eacute;e par ceux qui se sont assum&eacute;s comme &laquo;vainqueurs&raquo;.

3e partie&nbsp;: Tuer &agrave; distance 
Peck &eacute;tablit le lien d&rsquo;interd&eacute;pendance entre les innovations industrielles europ&eacute;ennes en mati&egrave;re d&rsquo;armement et le cycle sans fin d&rsquo;op&eacute;rations militaires et de conqu&ecirc;tes men&eacute;es au cours des si&egrave;cles.

4e partie. Les belles couleurs du fascisme 
Dans un &eacute;pilogue personnel, Raoul Peck relie la r&eacute;surgence du nationalisme blanc &agrave; l&rsquo;histoire mondiale du fascisme, de l&rsquo;esclavage, du colonialisme et de l&rsquo;Holocauste.

Le colonialisme europ&eacute;en, 600 ans d&rsquo;Histoire. Un documentaire choc&nbsp;!

Exterminez toutes ces brutes

Le 12 janvier dernier, le troisi&egrave;me anniversaire du s&eacute;isme qui a fait, en Ha&iuml;ti, 230 000 morts, 300 000 bless&eacute;s et 1,5 million de sans-abri, a donn&eacute; lieu au m&ecirc;me bilan s&eacute;v&egrave;re que les ann&eacute;es pr&eacute;c&eacute;dentes : reconstruction &agrave; peine entam&eacute;e, marasme &eacute;conomique, p&eacute;rennisation de campements de fortune et de nouveaux bidonvilles surpeupl&eacute;s &agrave; Port-au-Prince et alentour. C&rsquo;est cet &eacute;chec que le cin&eacute;aste ha&iuml;tien Raoul Peck a document&eacute; deux ann&eacute;es durant, en braquant son regard sur l&rsquo;aide internationale, qui en est &agrave; ses yeux la premi&egrave;re responsable. Arriv&eacute; sur place d&egrave;s le lendemain de la catastrophe, frapp&eacute; par le gigantisme et l&rsquo;opulence de la machine humanitaire qui se d&eacute;ploie, il d&eacute;cide d&rsquo;observer dans la dur&eacute;e le processus de la &quot;reconstruction en mieux&quot;. &quot;Build back better&quot;, promet en effet Bill Clinton, copr&eacute;sident (avec le Premier ministre ha&iuml;tien de l&#39;&eacute;poque, Jean-Max Bellerive), de la Commission int&eacute;rimaire pour la Reconstruction, charg&eacute;e de coordonner l&rsquo;ensemble des secours.

ASSISTANCE MORTELLE

Tourn&eacute; sur deux ann&eacute;es apr&egrave;s le s&eacute;isme en Ha&iuml;ti, un constat implacable sur la gestion calamiteuse de l&rsquo;apr&egrave;s-catastrophe par la communaut&eacute; internationale.

Assistance mortelle

Ils sont jeunes, beaux et talentueux. &Agrave; la rentr&eacute;e 1977, Abel, Matt, Caroline, Louis et Laure int&egrave;grent l&rsquo;&Eacute;cole nationale d&rsquo;administration, fleuron de l&rsquo;enseignement sup&eacute;rieur fran&ccedil;ais. Alors que la droite dirige le pays depuis plus de vingt ans, ils se jurent de faire &eacute;voluer de l&rsquo;int&eacute;rieur un syst&egrave;me qu&rsquo;ils jugent in&eacute;galitaire et d&eacute;pass&eacute;. Mais des bancs de l&rsquo;&eacute;cole aux minist&egrave;res, ils se retrouvent pris entre leurs id&eacute;aux de jeunesse et la r&eacute;alit&eacute; du terrain.

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T&eacute;l&eacute;film en deux parties de deux heures chacune, L&rsquo;&eacute;cole du pouvoir retrace les ann&eacute;es de formation puis l&rsquo;arriv&eacute;e au pouvoir de cinq jeunes &eacute;narques, librement inspir&eacute;s de la promotion Voltaire, qui a abrit&eacute; dans ses rangs S&eacute;gol&egrave;ne Royal, Fran&ccedil;ois Hollande ou encore Dominique de Villepin. Certaines ressemblances ne sont d&rsquo;ailleurs pas fortuites. Gr&acirc;ce &agrave; un travail d&rsquo;enqu&ecirc;te approfondi (les auteurs ont notamment interview&eacute; d&rsquo;anciens membres de l&rsquo;&eacute;cole) et &agrave; l&rsquo;utilisation judicieuse d&rsquo;images d&rsquo;archives, Raoul Peck donne &agrave; son film un rythme et un r&eacute;alisme saisissants. Servis par des acteurs pleins d&rsquo;&eacute;nergie, les personnages illustrent tout le paradoxe de l&rsquo;&Eacute;NA : que ce soit Matt, fils d&rsquo;ouvriers id&eacute;aliste, ou Abel, avocat militant, tous ont conscience du formatage dont ils sont victimes, mais peinent &agrave; r&eacute;sister aux sir&egrave;nes du pouvoir. Le film saisit avec justesse la complexit&eacute; des liens qui unissent ces jeunes hauts fonctionnaires aux plus hautes sph&egrave;res de l&rsquo;&Eacute;tat.

Cinq &eacute;tudiants int&egrave;grent l&rsquo;&Eacute;cole nationale d&rsquo;Administration en 1977 et d&eacute;couvrent les arcanes du pouvoir. Une radiographie tr&egrave;s juste de la formation des &eacute;lites fran&ccedil;aises sur fond de changement politique.

Raoul Peck

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