Harlem, 1955. Détective privé tout sauf fringant, Harry Angel est appelé dans l'étrange chapelle d'un culte sataniste pour se voir confier par un client méphistophélique du nom de Louis Cyphre (alias "Lucifer" dans la phonétique anglaise) la mission de retrouver un musicien disparu, Johnny Favourite. Bien que chacune de ses pistes le mène à la découverte d'un nouveau cadavre, Angel, aiguillonné par les dollars de son très persuasif commanditaire, accepte de se rendre dans une bourgade proche de La Nouvelle-Orléans, où une jeune prêtresse vaudou qui lit dans le passé doit lui livrer des informations décisives.


Après Midnight Express et Fame, et juste avant Mississippi Burning, l'éclectique Alan Parker orchestre avec brio autour de deux acteurs au sommet un cauchemar au suspense crescendo, entre polar et horreur. Travaillant avec un soin maniaque les décors, les couleurs, l'atmosphère de plus en plus étouffante d'un film qui semble littéralement suinter l'angoisse (entre autres fluides inquiétants), il lui insuffle aussi, avec le concours d'un Robert De Niro très inspiré par son rôle satanique, un salutaire soupçon de dérision. Alors qu'au fil de ses investigations labyrinthiques, qui tournent rapidement à une quête identitaire doublée d'un sanguinolent jeu de massacre, Mickey Rourke paraît peu à peu se dissoudre, on notera avec intérêt, comme le fit le malicieux critique américain Roger Ebert, que la composition méticuleuse de De Niro n'est pas sans rappeler, ongles démesurément longs exceptés, le physique et la gestuelle d'un certain… Martin Scorsese.